La mer! partout la mer! des flots, des flots encor

Tuesday, August 22, 2006

Vie de Rancé - Poétique de l'au delà

Chateaubriand, Vie de Rancé

Lire "Vie de Rancé" c'est faire avec Chateaubriand un pas au-delà du réel et des préoccupations quotidiennes qui peuvent être les nôtres. Rancé a vécu 74 ans. 37 au grand jour et 37 dans l'ombre. Pourtant sa deuxième vie est faite de Lumière.

Ce livre est certainement le plus incroyable écrit par l'auteur et se place juste à coté des "Mémoires d'outre-tombe". On reste abasourdi par tant de la poésie déployée. Comme Mozart pour son Requiem, Chateaubriand, au soir de sa vie, a reçu une commande de son confesseur l'Abbé Séguin et la réalise avec ferveur.

Des éclairs, un style inimaginable aujourd'hui. A-t-on depuis, écrit avec ce génie ?


Les âmes qui portaient des souvenirs disparaissaient comme ces vapeurs que j'ai vues dans mon enfance sur les côtes de la Bretagne ; brouillards, assurait-on, produits par les volcans lointains de la Sicile. On rencontrait sur toutes les routes de La Trappe des fuyards du monde ; Rancé à ses risques et périls les allait recueillir ; il rapportait dans un pan de sa robe des cendres brûlantes, qu'il semait sur des friches. Aujourd'hui, on ne voit plus glisser dans les ombres ces chasses blanches, dont Charles Quint et Catherine de Médicis croyaient entendre les cors parmi les ruines du château de Lusignan, tandis qu'une fée envolée faisait son cri.

En descendant des hauteurs boisées où je cherchais les lares de Rancé, s'offraient des clochers de paille tordus par la fumée ; des nuages abaissés filaient comme une vapeur blanche au plus bas des vallons.

Comment peut-on oser après…


Thursday, August 03, 2006

Les Cavaliers de Kessel ou le temps suspendu

Les Cavaliers de Joseph Kessel. Que dire, sinon la tristesse de la dernière page. On aimerait que ce livre ne finisse jamais tant l'auteur nous emporte dans un tourbillon de mots.

Quel style !
Quels personnages !
Quel auteur !


Joseph Kessel vous plonge dans les grandes steppes, dans un voyage à travers l'Afghanistan rêvé, transfiguré par l'auteur. Tout commence aavec le
Bouzkachi, jeu terrible dont la caracasse d'un belier fraichement tué est l'enjeu que les protagonistes se disputent à cheval, où tous les coups sont permis, ...

Ce roman est du même niveau que "Fortune Carrée", s'il ne le surpasse. On ne sort pas indemne, certes, mais transformé et ému. Pourtant qu'il est cruel, sauvage, violent. Aucun répit. On devient sage comme Guardi Guedj, fier comme le grand Toursène, violent comme son fils Ouroz, et pour un peu on échangerait quelques instants de notre condition humaine pour Jehol "le Cheval Fou"

Extraits

"Pour l'étalon, son allure tenait moins de la course que du vol. Suspendu, étendu dans l'air, il ne touchait le sol que pour s'en détacher d'un seul battement. Et Ouroz, le visage contre la crinière flottante, le corps léger, délié, comme fluide, n'avait point d'autre voeu que de flotter ainsi qu'il le faisait au-dessus de la steppe et si près d'elle que cette terre, cette herbe et sa propre essence lui semblait confondues"

Merci Jospeh Kessel, Tu es parti - depuis longtemps - rejoindre les âmes fortes. Il nous reste tes livres et la vie qui s'en dégage est un cri d'espoir.